LETTRE D'UNE AMIE
"Alors j'eus l'idée de ne pas sortir de ma demeure, bien que la pluie aurait pue m'être grande inspiratrice.
Je fouillais les placards dans la cuisine et dans les abysses de mes pensées. J'y trouvais plusieurs ficelles, pelotes de laine en coton, chaussures à talons aiguilles, fourchettes, journaux des années 1864, quelques verbes d'actions, des beaux noms et quelques autres broutilles qui me semblaient utiles pour l'élaboration du plan" trois petits points".
Eparpillant des chaises et échelles dans l'unique pièce, j'entrepris d'escalader ces montagnes munie de mon matériel philosophique. Accrochant les fils, ficelles, laines et coton au plafond bas...trois petits points. Je tissais une toile figurez vous, votre toile. J'occupais tout l'espace possible de ligne la traversant. Des lignes d'actions, des lignes rouges et vertes et bleues. Je pendais enfin les chaussures pour donner plus de consistance à l'espace, et puis plus d'humour. Suivait les fourchettes, les journaux, les dentelles et les théières, les mots que j'accrochais avec soin mais tout ceci avec plus de sérieux et d'esprit solennelle. Je tissais une belle toile d'idées en couleurs, mêlant l'espace, la matière, la musique, l'insoutenable légèreté, l'insoutenable consistance, la peur, les passés et les futurs. Tout ceci en une symphonie intuitive et mathématique de paradoxe. J'aurais aimé que vous soyez là, vous m'aurez aimé dans cette situation sens-absurde."